A l’issue des COP 26 de Glasgow et COP27 de Charm el Cheikh, les perspectives climatiques à horizon 2100 se résument à 3 scénarios:
- L’idéal : le Net Zero en 2050 permettant de stabiliser à 1,5 degré le réchauffement climatique en 2100 par rapport à 1850-1900,
- Les politiques politiques publiques en vigueur. Ce scénario baptisé STEPS (Stated Policies Scenario) par l’IAE, conduirait à un réchauffement de +2,5 °C, et sous réserve que tout se déroule sans imprévu…
- Les dernières promesses notamment de la COP26, dont certaines sont collectives et non encore réparties individuellement par pays comme sur le méthane. Ce scénario baptisé APS (Announced Pledges Scenario), nous promet un réchauffement de « seulement » +1,7 °C en 2100, mais après un dépassement (overshoot) d’ampleur variable selon les trajectoires de nos émissions dont celles du méthane. Il suppose notamment que toutes les cibles ambitieuses annoncées par les gouvernements soient totalement atteintes dans les délais impartis!
En amont de la COP28 de Dubaï, 3 rayons de soleil apparaissent et 4 leviers restent critiques.
Les 3 satisfactions marquantes de 2022 et 2023 concernent
- Le photovoltaïque qui déploie largement ses ailes avec une hausse de 26% de la capacité installée pour atteindre 1.300TWh fin 2022. De ce fait, la part des ENR dans l’électricité mondiale a atteint 30%. Et de nouvelles perspectives s’ouvrent avec des installations en mer…
- L’accélération des véhicules électriques: 10 millions se sont vendus en 2022, +55% vs 2021. Les usines de batteries en projet suffisent désormais pour satisfaire les besoins du scénario Net Zero à horizon 2030,
- Dans le secteur du bâtiment, les installations de pompes à chaleur ont crû de 11% (+40% en Europe, +19% au Japon, +11% aux USA). 10% du parc mondial de bâtiments est à présent chauffé par cet équipement électrique. Il nous faut atteindre 30% en 2030!
Ces rayons de soleil ne sauraient occulter la lenteur de bien d’autres développements dont le plus crucial est sans doute l’efficacité énergétique. De ce fait, 4 grands leviers critiques sont à actionner vite et fort:
- Dans le domaine de l’énergie (75% des émissions), renforcer l’efficacité, électrifier et décarboner est essentiel. Même si 2022 a vu notre efficacité énergétique progresser de 2%, le rythme qu’il faut atteindre est de 4% par an à horizon 2030! Ceci suppose une intense coopération internationale.
- Dans le domaine de l’usage des terres, stopper la déforestation en 2030 comme promis à Glasgow est crucial,
- Dans le domaine du méthane, baisser de 30% les émissions à horizon 2030 comme promis à Glasgow sera clé pour ne pas overshooter à un point qui rende certaines évolutions du système terre irréversibles,
- Booster la capture et séquestration du CO2 en sortie d’usines ou dans l’atmosphère sera enfin déterminant pour atteindre le Net Zero. Les projets actuellement prévus n’atteignent que 0,3Gt en 2030!
Face à ces défis, Sultan Al Jaber, Président de la COP 28 vient de dévoiler ce vendredi 14 juillet 4 grandes priorités:
- L’Énergie avec 6 ambitions: 1. Tripler la capacité d’énergie renouvelable et doubler le taux d’amélioration de l’efficacité énergétique dans tous les secteurs d’ici 2030. 2. Réduire de plus de moitié les émissions de scope 1 et 2 de l’industrie pétrolière et gazière, et réduire à presque 0 d’ici 2030 leurs émissions de méthane d’ici 2030. 3. Transformer les secteurs à forte émission, notamment grâce à l’hydrogène bas carbone, le captage et le stockage du CO2. 4. Des transports toujours plus décarbonés. 5. Accélérer les efforts en vue de la réduction progressive de l’électricité au charbon sans CC et de l’élimination progressive des subventions inefficaces aux combustibles fossiles, tout en s’attaquant aux émissions de méthane liées au charbon. 6. Les entreprises et les pays doivent se fixer des objectifs ambitieux, prendre des mesures et rester responsables par le biais de leur publications.
- Régler les problèmes de financement du Climat,
- Se concentrer sur les personnes et leurs moyens de subsistance,
- Rendre la prochaine COP totalement inclusive.
Comme toujours, certains détails font la différence:
- on note d’ores et déjà que l’Europe n’a pas obtenu son principal but de guerre: l’élimination – et non la réduction – du charbon,
- Les objectifs de baisse des émissions des industries pétrolières et gazières ne concernent que les scopes 1 et 2 et les émissions fugitives de méthane restent à juguler entièrement!
Mais la bonne volonté du pays hôte est marquée par une toute nouvelle Nationally Determined Contribution adressée aux Nations Unies et par laquelle le pays aligne ses ambitions sur le scénario de réchauffement à +2 degrés.
La suite dans les négociations des 4 mois à venir! L’arrivée de John Kerry, émissaire Climat des USA, à Pékin ce dimanche est un premier pas pour réactiver le dialogue sur le climat entre les 2 plus gros émetteurs mondiaux.
John Kerry et son homologue chinos Xie Zhenhua se sont déjà rencontrés 55 fois avant la visite de ce week-end. Les buts de cette manche sont au moins 3: Aider la Chine à découpler juguler ses émissions fugitives de méthane, à libérer ses énergies renouvelables d’un soutien continu du charbon, et enfin travailler ensemble sur la déforestation.
140 jours à nouveau critiques dans une décennie qui l’est encore plus!
