La COP26 de Glasgow avait propulsé de manière flamboyante l’initiative Glasgow Finance Alliance for Net Zero, co-présidée par Mark Carney et Michael Bloomberg. 

Cette Alliance rassemble le gotha, 550 des plus grandes banques et investisseurs mondiaux pour une puissance de frappe annoncée de 150.000 milliards d’actifs. À l’origine exemplaire, elle exigeait de tous ses membres et groupes de membres le respect des engagements du programme Race to Zero porté par les Nations Unies,

Bizarrement, peu d’annonces ont émergé de cette alliance lors de la récente COP27, alors que la gouvernance mondiale s’inquiète du rythme d’investissement global insuffisant dans les ENR, malgré l‘accélération dans plusieurs pays comme la Chine. Mark Carney a juste indiqué que 300 de ses membres avaient initié des objectifs de décarbonation pour le court terme. Mais en relevant immédiatement que leur non atteinte pouvait être imputé à  l’environnement externe, dont les clients. 

La réalité est que la dynamique de cette belle alliance est altérée depuis 12 mois par plusieurs bourrasques:

1- le stress soudain des Asset Managers confrontés à des offensives contre-climatiques… aux USA

  • plusieurs fonds de pensions, de sensibilité républicaine surtout, ont en effet poursuivi en justice des grands noms comme Blackrock pour politique d’investissement sub-optimale, c’est-à-dire sous-performante par rapport aux benchmarks de chaque classe d actifs…
  • Des initiatives de boycott ont également été lancées par plusieurs états américains, surtout actifs dans la production de gaz et de pétrole, à l’égard des gestionnaires d’actifs évitant ou excluant cette catégorie d’investissements.

2- la hausse des prix du pétrole et du gaz qui ont reconstitué des marges très/trop confortables pour les banques finançant ces énergies!

De ce fait les tractations et contorsions se sont multipliées pour éviter la défection de grands acteurs. 

  • Le 17 octobre, devant la menace de départs de poids lourds, Tracey McDermott,  présidente du sous-syndicat Net Zero Banking Alliance annonçait renoncer à la condition que tout membre soit rattaché au programme Race to Zero!
  • le programme Race to Zero annonçait lui même récemment que tous ses membres devaient imaginer leur propre cheminement vers 1,5°C… Ceci annule en pratique l’engagement de sortie des financements d’énergie fossile récemment envisagé par Race to Zero, qui avait le malheur de déplaire à des acteurs comme JP Morgan, Bank of America, Morgan Stanley!

Et malgré ces concessions incompréhensibles, de grands acteurs comme Blackstone, Carlyle, PIMCO restent en dehors de l’initiative, ce qui en dit long sur leurs allocations tactiques!…

Une des causes manifestes de cette errance est l’absence, dans ce paysage des institutions financières, de transparence, de challenge et donc de sanction réputationnelle pouvant déboucher sur un impact économique! Le détournement des clients, voire le boycott, ont des effets très rapides en B to B sur la croissance et les marges, ce qui permet la sensibilisation rapide du top management.

Il reste donc à finaliser des 2 cotés de l’Atlantique les normes internationales adaptées à cette industrie qui permettront de bien transpariser, comparer, challenger et, le cas échéant, sanctionner l’absence de discernement entre résultats de court terme et intérêt des générations futures.

Après la stabilisation des standards de l’EFRAG  et de l’ISSB, ce sera la prochaine étape urgente. Il faut en effet tenir compte du fait que ces acteurs ne sont qu’en 2e ligne par rapport aux entreprises directement émettrices. 

Dans l‘intervalle, on peut anticiper la recrudescence des procès climat dont les institutions financières sont de plus en souvent la cible. Et leurs dirigeants et administrateurs savent sans doute que c’est à présent leur responsabilité personnelle qui est de plus en plus en cause.