Le Royaume-Uni a été historiquement un leader mondial de la lutte contre le changement climatique, instaurant dès 2008 une législation ambitieuse pour réduire ses émissions de carbone. Cependant, les récentes impulsions du Premier ministre Rishi Sunak ont suggéré un réalignement des priorités au profit de l’économie et du développement. Cette  politique du court terme a suscité un vif débat au sein des sphères politique et publique. Et les récentes élections locales ont sanctionné cette nouvelle direction avec une vague verte !

Un leadership historique dans l’action climatique

L’héritage du Royaume-Uni en tant que leader climatique a commencé sous l’impulsion de Margaret Thatcher co-créatrice du GIEC avec Ronald Reagan en 1988 dans le cadre du G7 et à l’origine du sommet de la terre de Rio. La loi de 2008 au Royaume-Uni sur le changement climatique « Climate Change Act » a été pionnière en fixant des ambitions de réduction des émissions. L’organisation de la COP26 à Glasgow et la mise en place des premières fermes éoliennes offshore ont souligné son engagement à conduire l’action climatique au niveau mondial. Puis, la « révolution industrielle verte » de Boris Johnson en 2020 affirmait vouloir faire du Royaume Uni le leader mondial dans la lutte contre le réchauffement climatique avec le développement des énergies renouvelables (40% actuellement). Cette dynamique a permis au Royaume-Uni de réduire ses émissions de CO2 de 47% par rapport à 1990.

Un recul inattendu sur le Climat

Début 2023, en net contraste avec les engagements passés, le Premier ministre actuel Rishi Sunak a annoncé souhaiter ralentir le rythme de la transition climatique au profit de l’économie : fin des voitures à essence ou diesel reportée de 2030 à 2035, assouplissement des contraintes pour remplacer les vieilles chaudières à gaz, approbation du projet de champ pétrolifère de Rosebank en mer du Nord,…. . 

A la peine dans les sondages en vue des prochaines élections législatives, il a exprimé la volonté d’atteindre la neutralité carbone avec une approche plus pragmatique, proportionnée et réaliste pour séduire les électeurs et bien sûr obtenir un gain politique. 

Ce revirement a suscité de vives critiques au sein du parti travailliste  et même au sein du parti conservateur au pouvoir. Les milieux économiques, engagés dans des investissements propres de long terme, comme le grand public et les ONG n’ont pas compris ce coup de frein en dénonçant la confusion et l’incertitude générée par cette décision. Pour de nombreux observateurs, de tels changements sapent la crédibilité et le leadership du Royaume-Uni dans la politique climatique mondiale. Cette nouvelle orientation est d’autant plus dommageable que le dernier bilan NDC du Royaume-Uni tire la sonnette d’alarme. 

Source : The Climate Action Tracker

Un vote sanction

Ce sentiment général d’incompréhension, pour ne pas dire de choc et de colère, s’est reflété dans les élections municipales du 2 mai, les électeurs montrant leur nette préférence pour des politiques environnementales ambitieuses et constantes. 

La lourde défaite du parti conservateur (perte de 50% des sièges), les gains du Parti vert – record absolu de 812 «councillors» soit + 74 sièges sur un total de 2650 à pourvoir, plus grand parti au conseil de Bristol – et la réélection de Sadiq Khan pour un 3ème mandat comme Maire de Londres en sont l’expression concrète. 

La troisième victoire électorale du maire de Londres est particulièrement révélatrice. Ses politiques volontaristes de réduction des émissions dans la capitale anglaise avec par exemple l’expansion de la zone à très faibles émissions (ULEZ), l’ont positionné comme une figure clé dans le discours sur la politique climatique du Royaume-Uni.

Les enquêtes et sondages montrent qu’un nombre croissant d’électeurs scrutent les politiques environnementales des partis. Cette tendance de fond devrait pousser le parti travailliste à pousser ses pions « verts » pour marquer sa différence. Le leader du parti travailliste, Keir Starmer, s’est engagé à mettre la lutte contre le réchauffement climatique au cœur de ses priorités avec une politique ambitieuse d’énergies vertes : lancement des éoliennes flottantes, doublement des capacités des éoliennes terrestres, triplement de l’énergie solaire, relance du nucléaire, doublement de l’objectif de production d’hydrogène verte…

Avec les élections générales à l’horizon, début janvier 2025 au plus tard, la politique climatique du Royaume-Uni devient un enjeu décisif.  Elle se trouve à la croisée de chemins. Espérons que les citoyens seront plus ambitieux que les politiques leurrés par des objectifs courtermistes. 

Une fois encore, le Vouloir-Faire est primordial !