Suite à la publication de notre Palmarès de la Transparence des Trajectoires 2023 du CAC40, nous revenons plus en détail sur quelques bonnes pratiques relevées lors de notre étude préparatoire .

Cet article est le dernier d’une série qui aborde les thématiques du Vouloir Faire (Engagements 2030 et 2050), du Savoir Faire (Plan d’Actions ), du Pouvoir Faire (Impacts financiers) et de la Gouvernance.

Les plans de transition sont une clé de voûte stratégique des entreprises. La qualité de leur gouvernance opérationnelle est leur assurance Vie !

Il est donc justifié que la CSRD impose la transparence dans ce domaine.

Reprenons les éléments clé de ce dispositif stratégique :

1- Les plans de transition sont une clé de voûte stratégique de l’entreprise tout entière. 

En effet les objectifs de décarbonation influencent des dimensions aussi importantes que:

  • Les lignes de produits x segments de clients : en fonction de l’intensité carbone de leur cycle de vie prévisible en se projetant en 2030 et 2050,
  • Les implantations géographiques : en lien avec les niveaux de décarbonation des infrastructures énergétiques, de transport locales et internationales…
  • Les fournisseurs, qui forment les émissions amont du groupe,
  • Les distributeurs, qui alimentent le scope 3 aval. 

Les choix à long terme de ce mix (i) produits x clients, (ii) géographie, (iii) distribution sont au coeur de toute stratégie d’entreprise, qu’il s’agisse d’activités

  • Agricoles ou agro-alimentaires, dont les filières sont éminemment variables en termes d’intensité carbone,
  • Industrielles, dont l’électrification programmée exige des sources d’électricité moins carbonée, le nucléaire par exemple, 
  • De services tels que la distribution, qui peut être pénalisée à la fois par le pays de production et par l’intensité carbone du fret,
  • Et même d’institutions financières, qui peuvent être exposées, aux USA par exemple, à des assauts anti ESG !

Compte tenu de ces enjeux, c’est bien au plus haut niveau de direction du Groupe que cette stratégie doit être élaborée et validée. 

2- La gouvernance opérationnelle en est la clé de voûte fondamentale :

Rappelons que le conseil d’administration, composé de représentants des actionnaires, oriente, valide ou invalide, mais ne construit pas lui-même la stratégie à la place de la direction générale. En effet, il ne dispose pas des moyens permettant de produire une des composantes essentielles de tout exercice stratégique : L’étude d’impacts.

Or la stratégie de décarbonation présente objectivement des contraintes pouvant impacter à court ou moyen/long terme :

  • Sa croissance : arbitrage/remplacement de produits trop carbonés : C’est évidemment ce qui freine la sortie des banques surtout anglo-saxonnes des énergies fossiles, au moment ou leurs spreads sont au plus haut!
  • Ses marges :
    • mettre au rebut des lignes de fabrication ou d’extraction non amorties entraine instantanément une dépréciation financière de ces actifs (stranded assets), une nouvelle toujours désagréable pour les actionnaires,
    • Investir dans de nouveaux équipements ou infrastructures décarbonées consomme du cash et réduit les marges à court terme,
    • Demander aux fournisseurs de se décarboner promet des hausses de prix pour financer leurs investissements,
  • Sa productivité : décarboner ses immeubles, son informatique, ses déplacements est générateur de surcouts.

Des études d’impacts sur la trajectoire financière de l’entreprise sont donc impératives. Elles exigent le concours de toutes les équipes opérationnelles, internationales et financières, afin de bâtir les scénarios et de les chiffrer. À la direction générale ensuite de sélectionner ceux qu’elle voudra soumettre au conseil d’administration.

Une fois la stratégie validée, sa mise en œuvre exige des arbitrages permanents : Justement pour slalomer à court et moyen termes entre décarbonation et croissance, marges, productivité, projet par projet, trimestre après trimestre!

L’expérience de plusieurs membres des Ateliers du Futur a montré la complexité de certains sujets tels que 

  • Le lancement d’un plan de transition holistique,
  • Le lancement d’un programme immobilier décarboné pour les besoins propres de l’entreprise,
  • Les négociations avec des fournisseurs de biens et services décarbonés, en contradiction avec des objectifs permanents d’économies…

La conclusion est simple : La clé de la réussite est l’implication du plus haut niveau de direction du Groupe et de l’entreprise. 

D’où 

  • Notre exhortation fin 2021 à l’EFRAG et à la fondation IFRS d’inclure cette composante essentielle dans les exigences de publication extra financières,
  • La confirmation de cette exigence par la commission européenne dans les ESRS sur recommandation de l’EFRAG,
  • La prise en compte de ce critère dans notre Palmarès de la transparence et de la cohérence des trajectoires Climat du CAC 40.

3- Les gouvernances de Plans de Transition exemplaires du CAC 40:

Rappelons notre niveau d’exigence dans le cadre du Palmarès: Disposer d’un Comité Climat (ou équivalent) rattaché directement au DG ou à un membre du CODIR/COMEX, donc à caractère opérationnel.

Bonne nouvelle: 23 groupes du CAC 40 sont alignés avec cette vision d’une coordination opérationnelle forte de leur trajectoire de décarbonation: 

Seuls 9 groupes n’abordent pas le sujet de manière suffisamment transverse en laissant la direction du plan de transition au sein d’une entité particulière (direction RSE en général).

Bonne lecture des rapport extra-financiers de ces best-in-class !